DEVLHON Consulting décrypte : La résolution des crises bancaires – bilan et perspectives selon l’analyse de la Banque de France
Depuis la crise financière de 2008, la gestion des crises bancaires a profondément évolué, plaçant la résolution bancaire au cœur des stratégies pour sécuriser le secteur financier sans recourir systématiquement aux fonds publics. Dans cet article, DEVLHON Consulting vous présente une analyse issue de la Banque de France, qui propose un bilan du régime de résolution bancaire en Europe et souligne les enseignements tirés des récentes crises financières.
Les fondements de la résolution bancaire : protéger les finances publiques
La crise de 2008 a laissé un héritage de défis complexes pour les systèmes financiers. À l’époque, les gouvernements n’avaient d’autre choix que de renflouer les banques en difficulté aux frais des contribuables ou de les laisser faire faillite, risquant ainsi d’entraîner le système économique dans une instabilité prolongée. Depuis, des mécanismes de résolution bancaire ont été instaurés, permettant aux autorités de restructurer, voire de liquider une banque défaillante de manière contrôlée et en minimisant l’impact pour le public.
L’analyse de la Banque de France met en lumière le rôle central de la résolution bancaire dans l’Union européenne, qui repose sur trois piliers : le mécanisme de résolution lui-même, une supervision bancaire centralisée et une garantie des dépôts harmonisée. Ces outils permettent aux autorités de sécuriser les banques tout en s’assurant que les actionnaires et créanciers sont les premiers contributeurs lors des défaillances bancaires.
Les instruments de la résolution bancaire en Europe
Les banques européennes peuvent être placées en résolution suivant deux principales modalités :
Le bail-in : Ce mécanisme de renflouement interne impose aux actionnaires et aux créanciers de supporter les pertes d’une banque en difficulté avant de mobiliser des fonds publics. Il s’agit d’une méthode privilégiée pour limiter l’impact des crises bancaires sur les finances publiques.
Les opérations de transfert : Dans certains cas, il est possible de transférer des actifs et activités saines vers un acquéreur ou une « bad bank », permettant ainsi de séparer les actifs compromis et de stabiliser le reste de l’institution.
Un financement de la résolution bancaire qui repose sur la mutualisation
Le financement de la résolution est un aspect essentiel pour limiter les impacts des crises bancaires. Le Fonds de résolution unique (FRU), alimenté par les contributions des banques, est utilisé en Europe pour limiter l’intervention directe de l’État. Dans son analyse, la Banque de France souligne une différence majeure avec le modèle américain, où les autorités disposent d’un fonds fédéral plus flexible, permettant des interventions plus rapides.
En Europe, les autorités privilégient une approche qui rompt le lien entre banques et États, mais cela implique que les secteurs bancaires nationaux mutualisent leurs efforts au sein du FRU, ce qui peut limiter la rapidité de l’intervention. Ainsi, avant que les fonds publics ne soient mobilisés, les banques doivent démontrer leur capacité à absorber les pertes, dans le respect des normes MREL (Minimum Requirement for own funds and Eligible Liabilities), qui sont plus contraignantes que les normes TLAC (Total Loss Absorbing Capacity) américaines.
Les leçons des turbulences bancaires de 2023
Les récentes défaillances bancaires observées en Europe et aux États-Unis en 2023 offrent des enseignements précieux pour le régime de résolution européen, d’après l’analyse de la Banque de France. Bien que les mécanismes européens aient été efficaces, certains aspects nécessitent des ajustements. Les crises récentes, comme le rachat de Credit Suisse, ont montré que les interventions doivent pouvoir se faire rapidement, surtout face aux retraits massifs de dépôts amplifiés par les outils numériques.
Dans ce contexte, les États-Unis ont pu intervenir rapidement en utilisant des dispositifs de liquidité fédérale. En Europe, cependant, les banques ne bénéficient pas de ces facilités de liquidité en cas de crise, ce qui pourrait mettre en péril la stabilité du secteur financier européen.
Recommandations de la Banque de France pour renforcer la résolution bancaire
Pour répondre aux défis actuels, l’analyse de la Banque de France recommande des améliorations dans le régime de résolution européen :
Renforcer les exigences de fonds propres : Imposer des niveaux plus élevés de capacité d’absorption des pertes aux petites et moyennes banques, en complément des grandes institutions, afin de réduire les risques de contagion.
Diversifier les outils de résolution : Utiliser une combinaison d’instruments de résolution (renflouement interne, cessions d’actifs) pour s’adapter aux nouvelles formes de crises, notamment celles liées aux risques géopolitiques, climatiques ou numériques.
Instaurer un dispositif de liquidité d’urgence européen : La mise en place d’une liquidité d’urgence spécifique au niveau européen permettrait de soutenir les banques sans menacer la stabilité des marchés en période de retraits massifs de dépôts.
Conclusion
En plus de dix ans, la résolution bancaire a consolidé sa place dans l’architecture de l’Union bancaire européenne. Cependant, comme le souligne la Banque de France, le régime actuel doit évoluer pour s’adapter aux nouvelles vulnérabilités du secteur bancaire. Le renforcement des normes d’absorption des pertes, une approche plus flexible et l’accès à une liquidité d’urgence contribueraient à garantir la résilience du secteur financier en cas de crises futures.
En intégrant ces recommandations, l’Europe pourrait renforcer sa stabilité bancaire et construire une Union bancaire robuste et prête à affronter les défis modernes.
Source : file:///C:/Users/devlh/Downloads/Blog_371_FR.pdf