Selon Les Echos, BPCE a échoué à vendre Fidor au fonds Ripplewood Advisors, après deux ans de négociations. Le groupe mutualiste garde ainsi sur les bras la néobanque allemande qui devait être l’étendard de sa stratégie numérique.
Repassons brièvement le film. Au début des années 2010, Fidor, fondée en 2009 à Munich, est l’une des premières néobanques à apparaitre et à se distinguer. Il n’en faut pas plus pour qu’elle incarne la banque de demain. A l’époque, les séquelles de la crise de 2008 sont à peine refermées et on annonce tous les jours que les grandes banques sont condamnées, qu’elles vont incessamment être supplantées par de nouveaux acteurs agiles et disruptifs. On lit alors dans la presse spécialisée que le crowdfunding va largement remplacer les crédits bancaires…
On le dit, alors beaucoup y croient ! Et BPCE, en mettant la main sur Fidor en 2016, est sûre d’avoir réussi un joli coup. Au point que l’on puisse se demander si elle a vraiment examiné son acquisition !
Inséparable de la vogue qui est alors celle des réseaux sociaux, Fidor est une banque communautaire ou plutôt affinitaire, privilégiant le dialogue avec une communauté d’affidés plus que de réels clients. Au sein de BPCE, on pourrait rapprocher cette démarche de celles du Crédit coopératif ou de la Casden mais le rapprochement, visiblement, ne sera pas envisagé. Fidor doit être le fer de lance de la digitalisation du Groupe, dans le cadre de son Plan TEC 2020.
Pourtant, l’intégration de Fidor avec les Banques populaires et les Caisses d’épargne n’est pas du tout prête. Peu importe ! A l’époque, on croit au développement des solutions bancaires en « mode startup ». Fidor sera donc laissée libre de son développement. N’offre-t-elle pas de plus une intéressante fenêtre en Allemagne et au Royaume-Uni (où elle n’est implantée que depuis 2015).
A partir de là, cependant, rien ne va plus aller. Découvertes de pertes importantes liés à des placements hasardeux. Prise de distance des fondateurs. Et surtout, en 2017, Fidor ne parait plus si innovante.
Des néobanques autrement plus conquérantes, abondamment soutenues par des fonds d’investissement, vont changer la donne. Bientôt, on ne parlera plus guère de Fidor, qui parait comme vidée de sa substance. Acquise pour 150 millions €, Fidor fait l’objet d’une dépréciation d’actif de 148 millions € dans les comptes 2019 de BPCE ! La décision est prise de renoncer à lancer Fidor en France. BPCE se contera de lancer en Algérie, à travers la filiale locale de Natixis, Banxy, une banque sur mobile qui s’appuie sur la technologie de Fidor.
Fidor, en effet – c’est rétrospectivement ce qu’elle avait sans doute de plus innovant – a développé toute une activité de BaaS. Mais celle-ci sera cédée à Sopra Steria fin 2020.
Au total, on retrouve ici une attitude très fréquente des banques vis-à-vis des fintechs, qui revient à croire que l’acquisition d’un acteur innovant va d’elle-même les transformer. Le problème de BPCE en l’occurrence semble d’avoir beaucoup attendu de sa nouvelle nouvelle filiale, sans se demander au fond comment le groupe pouvait, à travers Fidor, lui-même innover.
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